
D’ailleurs, 150 communes autour d’Albi ont aujourd’hui rendu bilingue leur signalétique d’entrée de ville, parce que le Département a cofinancé les panneaux, mais aussi parce qu’il a préparé les esprits. La démarche a été appelée « Tarn cœur d’Occitanie ».
« Dès 2010 nous avons commencé par des enquêtes d’opinion, parmi les habitants, puis les professionnels » relatait Philippe Sour, à Castelnaudary, vendredi dernier, au cours du Forum Euro Régional organisé par le Cirdoc sur le thème des relations entre patrimoine, matériel et immatériel, et développement local.
Gagner les directeurs d'office du tourisme...à condition d'apporter la formation du personnel

Les professionnels du tourisme, sur cette base, peuvent à leur tour être approchés. Une enquête d’opinions des professionnels révèle ainsi que 85% des directeurs d’offices du tourisme du Tarn sont d’accord pour afficher sérieusement le terme. Mais à condition que les institutions proposent documentation et formation de leur personnel.
Dans la foulée, le CD81 édite un livret qui valorise les professionnels travaillant avec une pratique de l’occitan et qui en vivent : journalistes, artistes, etc.
« Une fois assurés d’avoir gagné les professionnels, il nous restait à informer les touristes ! » destination finale de la démarche, a souligné Philippe Sour. Car ce sont eux qui consommeront « occitan », et achèveront ainsi de convaincre les professionnels d’installer durablement la langue d’oc dans l’espace public, sur l’étiquette du pâté, ou le macaron du gîte rural…
Reste à parler...
« Gagné », c’est-à-dire que les professionnels, reconnaissant l’avantage économique de l’emploi de l’occitan, s’engageaient par charte à valoriser la langue dans leur activité.
Un succès peut-être un peu trop parfait. Car le sentiment favorable à la langue occitane, chez les professionnels du Tarn, s’il est devenu fort, ne s’accompagne pas si souvent de la faculté de la parler. « Nous en avons tellement fait que les touristes pouvaient penser qu’ils pourraient trouver des acteurs occitanophones » en veux-tu, en voilà.
Ce sera peut-être la prochaine étape. On le leur souhaite.
La mission réussie de Philippe Sour met en lumière une condition sine-qua-non pour faire passer la langue régionale du mépris à l’envie : elle doit être soutenue fermement par une collectivité. Il faut que celle-ci soit prête à y mettre des moyens et à agir dans la durée avec intelligence.
Une oasis en Provence, gagnée par le désert

Les collectivités, sur ce plan, à main gauche du Rhône, n’ont jamais dépassé le stade de la velléité.
La tentative, courageuse, des Gîtes du 04 et du 05 de marquer l’occitanité des accueils ruraux, à partir des années 2000, n’a rencontré qu’une sympathique bienveillance de la part même de ceux qui acceptaient la mention de la langue régionale sur leur macaron vert-jaune.
Notre enquête, en 2013, a montré qu’aucun soutien durable des professionnels n’a suivi. Elle a aussi rendu compte de la déception des rares professionnels réellement occitanophones prêts à jouer le jeu.
Avec une politique affirmée des Départements, ou de la Région, ou mieux des deux, la Provence connaîtrait-elle les mêmes succès que le Tarn ?