Le jury a rendu son verdict, le premier, et unique professeur agrégé d’occitan-langue d’Oc s’appelle Emanuel Isopet. Le jeune étudiant vient de l’Université de Toulouse Jean-Jaurès. Au bas mot une cinquantaine de candidats s’étaient présentés aux épreuves écrites voici deux mois. Ils étaient quatre en Provence.
Un agrégé, un seul, pour un enseignement promis à la disparition par la politique éducative française
Emanuel Isopet, premier agrégé d'occitan (photo XDR)
L’agrégation, un concours aux contours assez flous, favorise, dans la plupart des matières, les étudiants dont les professeurs sont le mieux représentés au jury. Dans de nombreuses matières, les agrégés « sortent » ainsi de Paris-Sorbonne, en second lieu de Lyon. Dans le cas de l’agrégation d’occitan, supposons que le jury aura pris un soin extrême à la sélection du meilleur candidat possible. Car il s’agit de fonder une bonne habitude.
En principe.
Car l’octroi de cette agrégation, par Mme Vallaud-Belkacem, quittant son ministère, avait des allures de cadeau de consolation. En donnant tous les pouvoirs aux principaux d’établissements secondaires, en rendant quasi impossible l’enseignement de langues régionales en classe de sixième, en autorisant désormais les élèves à quitter en cours de cursus, l’option de langues régionales, l’ex-ministre de l’Education a fait un mal immense à l’enseignement de nos langues minoritaires, « patrimoine de la France », comme dit le désormais ridicule article 75.1 de la Constitution du peuple français.
Mais permettre aux petites autorités infra locales de détruire la transmission de ce patrimoine ne suffisait pas. Après avoir épuisé la demande artificiellement, le gouvernement français n’avait plus qu’à démolir l’offre.
C’est-à-dire la création de postes d’enseignants en langues régionales. L’assèchement ici est ancien. Il touche tout autant le breton, l’alsacien ou l’occitan. Depuis 2003 on n’ouvre en effet qu’un maximum de quatre nouveaux postes de Capes. Le certificat d’aptitude au professorat d’occitan-langue d’oc n’est plus délivré qu’à quatre candidats par an. Et cela a plusieurs effets négatifs sur l’enseignement de la matière.
En premier lieu, le départ d’un enseignant sur un cours existant ne sera pas forcément remplacé, la matière ne sera donc plus enseignée. Plus du tout. Car il sera rarissime de trouver un principal de collège la demandant. Ces personnages clefs de l’établissement, pensent d’abord à concocter des emplois du temps cohérents. Les matières optionnelles les perturbent, les langues régionales leur semblent parfois odieuses. Elles dérangeraient la belle uniformité de la République.
Et puis, si le nombre de postes est si petit, s’il y a si peu de chances d’enseigner, pourquoi s’investir dans la préparation et la présentation de ce Capes ? Les étudiants, tout passionnés qu’ils soient, ont besoin d’un emploi, d’un avenir. Sans candidats, l'enseignement lui-même péricliterait vite.
Seule alternative crédible pour la matière, l’augmentation du nombre de postes créés. Afin de pouvoir développer l’enseignement des langues minoritaires, tout au moins d’arrêter aujourd’hui l’hémorragie, et afin de pouvoir donner espoir aux étudiants tentés par la carrière, comme aux parents qui tiennent à cet enseignement.
L’enseignement préparatoire, s’il est hélas indigent en Provence, est de belle qualité à Toulouse comme à Montpellier, où généralement les Provençaux préparent une licence d’occitan dont tous soulignent le haut niveau.
Le problème est en face, dans cette hypocrite attitude française, qui consiste à dire qu’on les aime nos langues de France…tout en pensant qu’on les aime encore mieux mortes.
Félicitations, Emanuel Isopet ! Vous n’êtes pas le dernier des Mohicans, pas tout à fait puisque que vous êtes en quelque sorte le premier. Car avec vous, qui avez travaillé avec acharnement à ce résultat, peut commencer une reconnaissance de l’occitan comme enseignement « sérieux ». Souvenez-vous toutefois que vos collègues capessiens sont pour leur part en général niés, si possible reversés dans l’enseignement de leur matière bis (ils passent un double Capes, ex. Occitan et Histoire-Géo), priés d’enseigner dans trois ou quatre établissements différents. Dévalorisés à l’extrême, ils se sentent comme la proie d’un tueur en série. L’Etat et une partie des administrateurs d’établissements ont « passé un contrat sur leur nom ».
En principe.
Car l’octroi de cette agrégation, par Mme Vallaud-Belkacem, quittant son ministère, avait des allures de cadeau de consolation. En donnant tous les pouvoirs aux principaux d’établissements secondaires, en rendant quasi impossible l’enseignement de langues régionales en classe de sixième, en autorisant désormais les élèves à quitter en cours de cursus, l’option de langues régionales, l’ex-ministre de l’Education a fait un mal immense à l’enseignement de nos langues minoritaires, « patrimoine de la France », comme dit le désormais ridicule article 75.1 de la Constitution du peuple français.
Mais permettre aux petites autorités infra locales de détruire la transmission de ce patrimoine ne suffisait pas. Après avoir épuisé la demande artificiellement, le gouvernement français n’avait plus qu’à démolir l’offre.
C’est-à-dire la création de postes d’enseignants en langues régionales. L’assèchement ici est ancien. Il touche tout autant le breton, l’alsacien ou l’occitan. Depuis 2003 on n’ouvre en effet qu’un maximum de quatre nouveaux postes de Capes. Le certificat d’aptitude au professorat d’occitan-langue d’oc n’est plus délivré qu’à quatre candidats par an. Et cela a plusieurs effets négatifs sur l’enseignement de la matière.
En premier lieu, le départ d’un enseignant sur un cours existant ne sera pas forcément remplacé, la matière ne sera donc plus enseignée. Plus du tout. Car il sera rarissime de trouver un principal de collège la demandant. Ces personnages clefs de l’établissement, pensent d’abord à concocter des emplois du temps cohérents. Les matières optionnelles les perturbent, les langues régionales leur semblent parfois odieuses. Elles dérangeraient la belle uniformité de la République.
Et puis, si le nombre de postes est si petit, s’il y a si peu de chances d’enseigner, pourquoi s’investir dans la préparation et la présentation de ce Capes ? Les étudiants, tout passionnés qu’ils soient, ont besoin d’un emploi, d’un avenir. Sans candidats, l'enseignement lui-même péricliterait vite.
Seule alternative crédible pour la matière, l’augmentation du nombre de postes créés. Afin de pouvoir développer l’enseignement des langues minoritaires, tout au moins d’arrêter aujourd’hui l’hémorragie, et afin de pouvoir donner espoir aux étudiants tentés par la carrière, comme aux parents qui tiennent à cet enseignement.
L’enseignement préparatoire, s’il est hélas indigent en Provence, est de belle qualité à Toulouse comme à Montpellier, où généralement les Provençaux préparent une licence d’occitan dont tous soulignent le haut niveau.
Le problème est en face, dans cette hypocrite attitude française, qui consiste à dire qu’on les aime nos langues de France…tout en pensant qu’on les aime encore mieux mortes.
Félicitations, Emanuel Isopet ! Vous n’êtes pas le dernier des Mohicans, pas tout à fait puisque que vous êtes en quelque sorte le premier. Car avec vous, qui avez travaillé avec acharnement à ce résultat, peut commencer une reconnaissance de l’occitan comme enseignement « sérieux ». Souvenez-vous toutefois que vos collègues capessiens sont pour leur part en général niés, si possible reversés dans l’enseignement de leur matière bis (ils passent un double Capes, ex. Occitan et Histoire-Géo), priés d’enseigner dans trois ou quatre établissements différents. Dévalorisés à l’extrême, ils se sentent comme la proie d’un tueur en série. L’Etat et une partie des administrateurs d’établissements ont « passé un contrat sur leur nom ».