“La réforme des lycées est l’expression d’un totalitarisme”

Manifestation unitaire contre la réforme Blanquer samedi à Paris


AIX. “Il est temps de nous révolter pour faire reculer le rouleau compresseur jacobin” a déclaré le député européen François Alfonsi, préparant la manifestation contre "l'enterrement des langues en danger de disparition".



François Alfonsi : "une vingtaine de députés ont déjà signé l'appel, il faut parler aux maires et avec eux commencer à renverser le rapport de forces" (photo MN)

C’est un véritable linguicide, et le ministre Jean-Michel Blanquer est un fossoyeur. Même l’enseignement immersif est considéré comme anticonstitutionnel par le ministre. C’est tout à fait insupportable et nous allons nous révolter”.

 

Ambiance! Le député européen François Alfonsi est particulièrement remonté, à quelques jours d’une manifestation qui doit faire date. Un collectif de 37 associations de défense et promotion des langues minoritaires en France appelle à Manifester le samedi 30 novembre à Paris, sous les fenêtre de M. Blanquer, ou du moins dans le quartier de son ministère.

 

L’Etat crée une agrégation de langues régionales, pendant qu’il réduit à rien le coefficient de celles-ci au baccalauréat” renchérit Paulin Reynard, pour souligner, dixit François Alfonsi, “ce qui constitue un véritable linguicide! Avec les méthodes d’un totalitarisme”.

 

Le député européen s’était rendu à Aix-en-Provence hier lundi pour clamer avec le collectif “Pour que vivent nos langues”, que l’hostilité ministérielle entrainerait une réaction. La manifestation parisienne de samedi mettra en présence Breton, Basques, Corses, Occitans, Alsaciens, etc. et de la rencontre fermentera probablement un mouvement coordonné en vue de faire plier le ministre “linguicide”. Elle sera fondatrice d’un mouvement propre à faire reculer le ministre” selon M. Alfonsi, “malgré le rouleau compresseur du jacobinisme, que nous ne supportons pas”.

 


"M Blanquer nous propose un enterrement et s'étonne qu'on refuse de mourir "

Le baile des jeunes du Félibrige, Paulin Reynard, coordonnateur des associations en Provence (photo MN)

La réforme dite Blanquer, engagée en 2019, vise à privilégier un ensemble d’enseignements fondamentaux, et à laisser les autres dans un corpus d’options, où l’enseignement des langues régionales à la part du pauvre. Le coefficient attaché à la matière ne pourra représenter au plus qu’1% de la note du bac, et l’élève qui choisit cette option ne peut en prendre d’autres. Autrement dit, choisir le corse ou l’occitan au bac, c’est choisir sciemment de renoncer aux points qui attirent les lycéens. Ceux qui apprécient la matière en sont éloignés s’ils veulent maximiser leurs chances d’obtenir l’examen.

 

Or, si les lycéens volontaires se détournent de leurs langues, le vivier des futurs enseignants de ces mêmes langues se vide. “M Blanquer nous propose un enterrement, et s’étonne qu’on ne veuille pas mourir!” image M. Alfonsi.

 

Même si la réforme mettra environ deux ans à rendre ses effets néfastes, le temps que les élèves se découragent vraiment, déjà les conséquences sont palpables, souligne Paulin Reynard. Le jeune homme , baile des jeunes du Félibrige s’est retrouvé au centre de la révolte en Provence, et il peut affirmer que “à Carpentras par exemple, où deux lycées enseignaient la langue, la dotation horaire ne permet plus que de l’enseigner dans un seul, et les autres doivent donc faire deux kms à pied pour prendre leur cours...Rapidement ils ont jeté l’éponge!”.


Une France hostile à la diversité linguistique dans une Europe qui la valorise

Une mort annoncée et voulue par “un Etat où une bonne part du personnel politique se retrouve dans un courant hostile à la diversité linguistique” affirme François Alfonsi. Car depuis 1994 et la modification de l’article II de la Constitution, “la langue de la République est le français”, ce qui devait lutter contre l’anglais mais ne sert qu’à étouffer l’expression des langues ...de France.

 

Une vingtaine de parlementaires français ont toutefois signé l’appel à manifester, et, François Alfonsi en est persuadé, naîtra de là un mouvement propre à gagner l’opinion publique. “Nous sommes en Europe, où la diversité est possible sinon valorisée, et nos langues appartiennent à l’Europe, la France n’a pas à détruire ce patrimoine européen”.

 

Le 20 mars dernier au Rectorat d'Aix-Marseille. Réagir contre le linguicide (photo MN)


Lundi 25 Novembre 2019
Michel Neumuller