Des BD en occitan…en passant par la case « adaptation »


AIX-EN-PROVENCE. Une politique d’aide durable à la traduction de bandes dessinées en provençal ou niçois nous mettrait sous les yeux des ouvrages et ferait naître les vocations créatrices, qui aujourd’hui se détournent de la langue régionale.



Jean-Pierre Belmon à Aix : "des aides pour traduire les BD en oc et donner une impulsion aux créateurs" (photo MN)
Si la traduction de bandes dessinées en occitan existe, « elle reste anecdotique au contraire de la traduction en breton qui, finalement, bénéficie à la création ».
 
En brossant l’histoire de la BD en occitan Jean-Pierre Belmon, le président du Cep d’Oc, en est venu à aborder la question économique, lors d’une conférence organisée dimanche 12 avril 2015, dans le cadre des Rencontres du 9è art, à Aix-en-Provence.
 
Car, pour un « Rabasso sus Radassié » de Leo Loden (Soleil productions 2007), traduit en provençal par Frédéric Soulié, on trouvera dix albums traduits en breton.

Et il faudra compter aussi des BD créées pour aider l’apprentissage de la langue celte dans les écoles Diwan, que soutiennent le Conseil Général du Finistère.
 
« En Bretagne, l’aide du Conseil Culturel de Bretagne a permis de financer les traductions d’œuvres très connues, comme la série Thorgal, ce qui a créé une impulsion chez les créateurs bretons » soutient Jean-Pierre Belmon.

Une oeuvre à traduire en occitan, galicien, euskara

Multiplier l'offre grace aux traductions de BD ?
Une politique de financement public semble donc nécessaire pour soutenir, au-delà de quelques traductions éparses, un véritable système, durable, qui profiterait ensuite, par émulation, à la création en langue d’òc.
 
La solution viendrait-elle aussi de la mutualisation ? Le Papagai, que publie la Scop Vistedit, qui édite notre confrère La Setmana, profite aux élèves d’écoles publiques et Calandretas, tout en donnant lieu à des traductions en galicien comme en euskara.
 
Une solution qui pourrait donner lieu à des collaborations, par exemple, entre Bretons armés pour organiser un système de traductions, et Occitans qui cherchent à embrayer sur une politique durable en la matière, imagine Jean-Pierre Belmon.
 
« Si, à la base, une demande ne s’exprime pas, si les gens qui se disent intéressés par la langue ne sont pas prêts à y consacrer quelques €uros, il y a un problème » estime toutefois Jean-Marie Ramier, enseignant et traducteur d’épisodes de la série télévisée Tintin, pour France 3.

Démontrer qu'une demande existe

Car nous ne sommes plus à l’époque où la foi militante pouvait faire naître et vivre des revues dessinées comme une Ratapinhàta (Nice) ou un Rictus occitan (Toulouse), dont Jean-Pierre Belmon a retracé les riches heures d’impertinence post soixante-huitarde.
 
Un discours appuyé par Pèire Brechet, au cours du débat qui a suivi la conférence. « Il faut bien prouver qu’une demande existe pour aller réclamer une aide publique » soutient le président de l’Institut d’Estudis Occitans.
 
« On manque de créateurs qui s’investissent dans la BD en occitan » estime de son côté Anne-Marie Poggio, qui a soutenu également à l’IEO, l’organisation de projets de mangas, et pense que « la traduction est une solution actuellement pour disposer d’œuvres ».
 
Si toutefois une politique d’aides durables le permettait, des traductions auraient non seulement l’avantage de proposer des bandes dessinées aux lecteurs, occitanophones ou en apprentissage, mais encore pourraient faire naître quelques vocations parmi les créateurs qui, aujourd’hui, évoluent dans un univers où l’occitan est quasi absent.
Une BD créée en 1976 par Reno et publié dans la Ratapinhata (doc Coloc DR)


Dimanche 12 Avril 2015
Michel Neumuller