Pèire Bréchet : « se réserver le nom d’Occitanie est une erreur morale »


Le président de l’IEO Fédéral s’inquiète de voir la réalité culturelle occitane passer par la moulinette de la marque déposée. « L’Occitanie c’est quatre régions de France et deux hors des frontières » rappelle-t-il.



Pèire Bréchet (photo MN)
Ouverte jusqu’au dix juin dernier, la consultation sur le futur nom de l’actuelle Région qui regroupe Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon a donné ses résultats le 16. 44,90 % des 168 826 souhaits exprimés se sont portés sur le nom d’Occitanie. Les votes, exprimés sur liste par ordre de préférence entre deux choix, donneront lieu à un débat des élus régionaux, le 24 juin. Ceux-ci exprimeront aussi leur avis. Enfin, la nouvelle appellation sera soumise à l’Etat, qui dispose en la matière. Mais si l’Occitanie se situe demain institutionnellement entre Toulouse et Montpellier, sommes-nous, Provençaux ou Auvergnats, tout d’un coup, des étrangers ? Le sentiment de Pèire Brechet, le président de l’Institut d’Estudis Occitans…Un Provençal.
 
L’Occitanie se résumera-t-elle à deux Régions…occitanes, demain ?

L’Occitanie, ce sont quatre régions françaises et deux hors des frontières, en Italie et en Espagne. L’essentiel c’est qu’il s’agit d’une idée qui traverse les frontières. J’invite les élus des ex Régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyérénées à se poser la question : si l’Occitanie est le lieu où se parle l’occitan, alors que parlent les Auvergnats, Aquitains ou Provençaux ? A ces élus de voir quoi décider, mais à nous, IEO, de les alerter.
 
Pourra-t-on demain se dire encore Occitans hors Toulouse et Montpellier ?
 
L’idée occitane porte une culture et sa langue, certes marquée par la variété, mais aussi par la cohérence. Je ne pense pas qu’on puisse en faire la propriété de l’un ou de l’autre. Or, la Région concernée par cette consultation a d’ores et déjà déposé à l’INPI le nom d’Occitanie. Théoriquement, qui l’emploie demain est justiciable. Un comble. Et ce n’est pas une vue de l’esprit. Le maire de Laguiole doit en savoir quelque chose, lui qui se bat devant les tribunaux pour avoir le droit d’utiliser le nom de sa commune !
 
Il s’agit ici de la volonté de gens consultés. Quelle valeur lui accorder ?
 
Nous ne savons pas ce que les gens qui se sont exprimés mettent derrière ce mot d’Occitanie. Pour beaucoup il s’agit de leur région et ça ne va pas plus loin. S’ils ont été nombreux à s’exprimer, ils représentent toutefois une faible minorité des habitants de cette région. Doit-on considérer que les autres, la grande majorité, s’en moquent ? En tout cas les Occitans de toutes régions, eux n’y sont pas indifférents. Et pour ceux-ci, c’est une erreur, morale, de réserver à deux régions ce que l’histoire a construit sur un bien plus vaste territoire.
 

Vendredi 17 Juin 2016
Michel Neumuller